En mémoire de Marc Dujardin

Notre collègue et ami, Marc Dujardin, militant de la première heure du mouvement des maisons médicales, nous a quitté le 12 avril dernier. Marco a travaillé comme médecin chez nous. Certain.e.s d’entre vous s’en souviennent peut-être …

Notre collègue Gilles Henrard a rédigé pour lui cet hommage que nous voulions vous partager:

 

Marc Dujardin est le genre de personnage à propos duquel on se souvient de sa première rencontre.

Verbe haut, force et conviction.

Il avait remis les pieds en clinique à l’occasion d’un remplacement à la Maison Médicale La Passerelle, où j’effectuais mon assistanat. Il avait trouvé en salle de réunion un bouquin de Georges Orwell, qu’il admirait, et cherchait ardemment son propriétaire. On pouvait y lire ceci : « Être humain consiste essentiellement à ne pas rechercher la perfection, à être parfois prêt à commettre des péchés par loyauté, à ne pas pousser l’ascétisme jusqu’au point où il rendrait les relations amicales impossibles, et à accepter finalement d’être vaincu et brisé par la vie, ce qui est le prix inévitable de l’amour porté à d’autres individus ». Je trouvais cela parfait pour un hommage post-mortem, c’était peut-être un peu mollasson à son goût.

Il avait le goût immodéré de l’énergie accompagnant la naissance des actions collectives. Il a intégré notre Maison Médicale très tôt après sa création, dès 2007 je pense. Nous occupions toujours le petit bâtiment du numéro 18 de la rue Maghin, et faisions les réunions d’équipe en poussant les chaises de la salle d’attente. Il a toujours occupé une position de franc-tireur. Avec une liberté de ton qui laissait parfois pantois, collègues comme patients, mais qui souvent, aussi, pouvait décomplexer, insuffler l’élan nécessaire et suggérer une sortie par le haut. Il a appris à beaucoup d’entre nous, jusqu’à la dispute, de pouvoir assumer le désaccord et la polémique.

Marco avait une densité de vie hallucinante. Probablement le petit frère de Jack London. Etudiant au Cap vert, traversant le désert en solitaire et faisant le coup de fusil en Erythrée. Un touche-à-tout autodidacte. Tour à tour plongeur, marin, musicien, jardinier et bouilleur de cru. Une érudition et un sensibilité rare. Le talent de semer des mots et des objets utiles.

D’autres feront l’éloge de son action décisive pour les soins de santé primaire en Belgique. Vous l’entendrez parler de cette période de sa vie savoureusement quelques minutes ici (https://www.maisonmedicale.org/-2004-.html). Lui me disait que sa plus grande satisfaction professionnelle avait été les compliments d’un vieux patient italien sur la qualité de la pose du carrelage qu’il venait d’effectuer dans sa première maison médicale à Seraing.

Je garde l’image de Marc, chipant la guitare d’un quidam aux Olivettes tard dans la nuit après un souper d’équipe, pour interpréter une chanson anarchiste italienne dont je donnerais cher pour retrouver le nom…

Gilles Henrard, pour la Maison Médicale

 

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